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ORPEA accélère sa croissance malgré le COVID.
15/02/2021

ORPEA accélère sa croissance malgré le COVID.

Le groupe de maisons de retraite qui a bien résisté en 2020 compte accélérer son rytme d’ouverture d’établissements et renforcer ses positions mondiales.

Yves Le Masne,  directeur général d’Orpea | Crédits photo : Patrick Lazic
Yves Le Masne, directeur général d’Orpea | Crédits photo : Patrick Lazic

Vous publiez un chiffre d’affaires annuel de 3,9 milliards d’euros, en croissance de 4,9%. Qu’est-ce qui explique une telle résistance dans le contexte difficile de 2020 ?

 La résilience de l’activité résulte en partie de la situation du réseau désormais dans 25 pays, dans différentes parties du monde. Lors de la première vague, par exemple, le fort ralentissement constaté, en Autriche du fait de la fermeture des cliniques de soins de suite pour concentrer tous les moyens financiers sur la prise en charge des patients Covid à l’hôpital, mais aussi en Espagne dans les maisons de retraite de Madrid, région violemment touchée par la pandémie, a été en partie compensé par une bonne résilience dans les maisons de retraite en Allemagne, en Suisse ou au Brésil. Un équilibre entre les différents pays et métiers s’est mis en place, ce qui a limité l’impact de la crise sanitaire.

Au dernier trimestre, la reprise s’est fait sentir dans les établissements sanitaires qui ont retrouvé un taux d’occupation proche de celui d’avant-crise, autour de 95%, alors que ce dernier est resté stable dans les maisons de retraite. Les ouvertures de sites ont aussi pu reprendre, ce qui nous a permis de renouer avec une croissance organique de 1,2% sur cette période, soit le double du trimestre précédent. En France, le taux d’occupation en Ehpad se situe encore 3% à 5% en dessous du niveau normatif du groupe de 95%, et en Espagne, il se situe à environ 80%. Nous estimons qu’un retour total à la normale devrait intervenir courant 2021.

La campagne de vaccination va-t-elle y contribuer ?

 Certainement. Aujourd’hui, deux tiers de nos résidents sont vaccinés, avec des différences selon les pays. Nous commençons à en voir les effets en Espagne, pays qui a été le plus touché, où le taux de vaccination en Ehpad atteint plus de 85 % tant pour les résidents que pour le personnel. En France, le taux de vaccination des résidents est de 62%, il est plus faible pour le personnel étant donné que la vaccination est, pour le moment, réservée aux plus de 50 ans, soit moins de 20% de nos collaborateurs.

Comment gérez-vous la pénurie de personnel soignant ?

Les équipes ont fait preuve d’un engagement et d’une mobilisation exceptionnels depuis le début de la pandémie. C’est pourquoi, afin de les remercier, nous leur avons versé une prime, quels que soient les pays, et en plus des éventuelles primes gouvernementales perçues. Nous avons également diversifié nos sources de recrutement et nous développons beaucoup la formation et la promotion interne. Nous avons, par exemple, acquis la plus grande école de formation d’infirmières et aides-soignants en Autriche, l’objectif étant de favoriser les évolutions de carrière dans le groupe.

A combien estimez-vous l’impact de la Covid sur la marge d’Ebitdar ?

Au premier semestre, l’impact de la baisse d’activité a été de 67 millions, compensé par 41 millions d’euros d’aides gouvernementales. Nous estimons l’impact global de la crise à 53 millions sur cette période en raison des surcoûts de personnels et d’équipements de protection. Il devrait être moindre au second semestre, du fait de meilleurs taux d’occupation. semestre du fait de meilleurs taux d’occupation.

Quelles sont vos perspectives de développement ?

 Sur un parc de 105.000 lits, nous disposons de 21.000 lits en construction non encore ouverts, qui sont situés à 85% à l’international. Ce réservoir de croissance garantit quatre à cinq ans de progression organique d’environ 3% à 4%. Cette année, nous allons ouvrir 4.000 lits issus de ce portefeuille, essentiellement au second semestre. Ces ouvertures marquent une accélération du rythme de plus du double de ce que nous réalisions ces dernières années. Nous avons l’objectif d’ouvrir un établissement par semaine dans les prochaines années. Nous réalisons un développement équilibré à partir de nos quatre plateformes géographiques (regroupant plusieurs pays) : France Benelux, Europe de l’Est, Europe centrale et péninsule Ibérique/Amérique latine. Cette nouvelle organisation décentralisée nous permet d’avoir des structures allégées avec une autonomie contrôlée dans chacun des 25 pays, dont le nombre a doublé en quatre ans. Nous voulons également diversifier cette internationalisation en nous développant aussi dans les cliniques de soins de suite, la santé mentale, les résidences services et le soin à domicile. Il est nécessaire d’être présent sur tout le parcours de la prise en charge de la personne âgée.

Les acquisitions restent-elles d’actualité ?

En 2020, nous avons racheté quatre groupes de taille moyenne, deux en psychiatrie, en France, et deux en maisons de retraite, en Irlande, soit près de 3.000 lits supplémentaires qui représentent à terme 220 millions de chiffre d’affaires. Nous privilégions toutefois les créations d’établissements car les multiples d’acquisition ont flambé dans le secteur. Ils peuvent atteindre 13 à 15 fois l’Ebitda, soit deux à trois fois le chiffre d’affaires de la cible. Le développement par création est plus lent, et nécessite quatre à cinq ans entre l’acquisition du terrain, l’obtention des autorisations d’ouverture et la construction de l’établissement. Cependant, il participe à un cercle vertueux beaucoup plus créateur de valeur, et c’est ce qui a forgé le succès d’Orpea et que nous allons encore renforcer pour les années à venir. Au total, la croissance de l’activité, attendue autour de 8% par an, devrait se réaliser de manière équilibrée entre développement organique et acquisitions.

Comment voyez-vous Orpea dans cinq ans ?

Au-delà de l’accélération de l’internationalisation du groupe - donc d’un poids moindre de la France - et d’une présence élargie partout à tous nos métiers, nous souhaitons être un exemple en matière de RSE. Tous les établissements que nous allons construire répondront à ces critères verts (amélioration de la qualité de l’air, économie d’énergie, verdissement des espaces extérieurs). La formation, la promotion et le bien-être des salariés seront aussi une priorité renforcée.

La dette nette avoisine 6 milliards. De quelles capacités financières disposez-vous ?

 Au 30 juin, la trésorerie s’élevait à 900 millions d’euros. Nous avons accru la diversité de nos financements en utilisant, par exemple, l’instrument du Schuldschein [crédit semi-obligataire]. Nous avons aussi réalisé notre premier financement obligataire privé sur la base de critères extra-financiers, c’est-à-dire RSE. La dette finance à 85% de l’immobilier sécurisé, car situé pour l’essentiel dans des emplacements premium dont le locataire est Orpea. Nous disposons d’une grande facilité à lever des fonds à un prix attractif. Au 30 juin, le coût de la dette était de 2,4%, à comparer à 3,8% cinq ans plus tôt, ce coût résultant pour une grande partie des couvertures de taux protégeant Orpea contre d’éventuelles futures hausses de taux. Notre levier financier se limite à 2,8 face à des covenants de 5,5 [niveau plafond imposé par les banquiers], sachant que de toute façon l’objectif n’est pas de réaliser de grandes opérations d’acquisition.

La stratégie immobilière va-t-elle évoluer ?

Non, notre objectif est toujours de maintenir un taux de détention situé entre 45 et 55% de notre patrimoine immobilier, valorisé, de façon prudente 6,3 milliards d’euros au 30 juin 2020. Cette politique implique la cession d’environ 400 à 500 millions d’euros d’actifs par an. Notre secteur est très recherché par les foncières et par les investisseurs immobiliers en raison de sa résilience. Le marché nous propose ainsi pour plusieurs milliards de cessions possibles, traduisant l’attractivité du secteur en matière d’immobilier de santé et la qualité de nos emplacements. Compte tenu de notre génération de cash-flow, nous n’avons pas besoin, de ce fait, de beaucoup de capitaux pour poursuivre notre développement.

La distribution d’un dividende au titre de 2019 a été suspendue. Va-t-elle reprendre ?

 Nous avons été l’un des premiers groupes, en 2020, à demander au conseil d’administration une suspension du dividende. Celui-ci a approuvé à l’unanimité cette proposition, mais ce qui a été une très agréable surprise pour moi a été la ratification à la quasi-unanimité (99 %) de l’assemblée générale. Ce signal fort de solidarité a été particulièrement apprécié, notamment par les gouvernements des pays dans lesquels Orpea est implanté, et par l’ensemble des salariés. Le groupe étant en train de revenir à une situation normale, il n’y a aucune raison qu’il n’y ait pas de dividende versé en 2021, sachant que nous distribuions habituellement un tiers de nos résultats ces dernières années.


Source : investir.