Ehpad, Clariane, Orpea : du rouge au vert 16/11/2023
Les deux leaders français des maisons de retraite, Clariane (ex-Korian) et Orpea, traversent une période difficile, marquée par la crise sanitaire, le scandale de maltraitance et la pression financière. Mais les deux groupes ne sont pas dans la même situation et n'adoptent pas la même stratégie pour se redresser.
Clariane, le changement de cap
Clariane, qui gère plus de 1 000 établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et de soins en Europe, a annoncé le 25 avril 2023 son changement de nom et de statut. Le groupe, qui s'appelait auparavant Korian, a choisi de devenir une entreprise à mission, c'est-à-dire une société qui se fixe des objectifs sociaux et environnementaux en plus de sa finalité économique.
Ce changement de cap intervient après une année 2022 difficile pour le groupe, qui a été touché par la pandémie de Covid-19 et par les répercussions indirectes du livre "Les Fossoyeurs" paru début 2022, qui s'attaquait à son principal concurrent Orpea mais qui jetait une lumière crue sur les pratiques des sociétés privées en général. Le groupe a vu son chiffre d'affaires baisser de 4,5% en 2022, à 3,7 milliards d'euros, et son résultat net plonger de 77%, à 37 millions d'euros.
Pour se relancer, Clariane a décidé de se recentrer sur son cœur de métier, les Ehpad, et de se désengager progressivement des autres activités, comme les cliniques ou les résidences seniors. Le groupe a également lancé un plan de refinancement de 1,5 milliard d'euros, avec le soutien du Crédit Agricole, qui va devenir son premier actionnaire avec 15% du capital. Ce plan vise à réduire l'endettement du groupe, qui s'élevait à 3,2 milliards d'euros fin 2022, soit 5,6 fois son excédent brut d'exploitation.
Orpea, le sauvetage de l'État
Orpea, qui gère plus de 1 100 Ehpad et cliniques en Europe, est dans une situation encore plus critique que son rival. Le groupe, qui était visé par le livre "Les Fossoyeurs" pour des faits de maltraitance et de détournements de fonds publics, a vu son cours de Bourse s'effondrer de plus de 80% en 2022. Le groupe a affiché une perte nette de 1,2 milliard d'euros en 2022, pour un chiffre d'affaires de 4,1 milliards d'euros, en baisse de 3,2%.
Le groupe, qui croule sous une dette colossale de 9,5 milliards d'euros, soit 12,8 fois son excédent brut d'exploitation, a été contraint de faire appel à l'État pour éviter la faillite. Le 1er février 2023, le groupe a annoncé que la Caisse des dépôts allait reprendre le contrôle du groupe, à l'issue d'une opération visant à assainir sa structure financière et à lui permettre de mettre en œuvre son plan de transformation. La Caisse des dépôts va injecter 2 milliards d'euros dans le groupe, en échange de 51% du capital. Le reste du capital sera réparti entre les créanciers du groupe, qui acceptent d'effacer une partie de la dette, et les actionnaires actuels, qui seront fortement dilués.
Le plan de transformation du groupe prévoit notamment de céder des actifs non stratégiques, de renforcer la qualité des soins et des services, de rénover les établissements existants et de développer de nouveaux projets. Le groupe espère retrouver une croissance rentable à l'horizon 2025.
Un secteur en pleine mutation
Les deux groupes, qui représentent à eux deux plus de 20% du marché français des Ehpad, sont confrontés à des défis communs, liés à la crise sanitaire, au vieillissement de la population, à la pénurie de personnel qualifié, à la concurrence des nouveaux acteurs, à la pression des pouvoirs publics et à l'exigence des familles. Le secteur des Ehpad est en pleine mutation et doit s'adapter aux besoins et aux attentes des résidents et de leurs proches.
Les deux groupes ont choisi des voies différentes pour se redresser, mais ils partagent le même objectif : redorer leur image et restaurer la confiance. Ils doivent également faire face à la concurrence des autres acteurs du secteur, comme Colisée, LNA, DomusVi ou Domidep, qui cherchent à se développer et à se différencier. Le marché des Ehpad est un marché porteur, mais aussi un marché exigeant, qui requiert des investissements importants et une qualité de service irréprochable.